Cet espoir qui nous appelle ailleurs

Recueils de textes d’auteur.e.s qui nous aident à
mieux vivre nos phases de transition de vie.

« Cet espoir qui nous appelle ailleurs » a vocation à parler d’aventure. De l’aventure d’une vie remplie de zig et de zags, où les changements de cap sont inconfortables.

À travers des extraits de textes d’auteurs et d’autrices, ponctués par quelques réflexions personnelles, nous allons explorer d’autres récits, d’autres visions, pour doucement se décentrer. L’objectif est de se permettre, petit à petit, d’accéder à une autre perception de ces phases si complexes que l’on appelle transitions de vie.

Bon voyage et bonne lecture !

– Chapitre 3 –

Le sens et l’utilité des phases de transitions

Partie 2

Le mal-être est une expérience identitaire à part entière.

1. “Puisque nous avons la chance de connaître le malheur, nous sommes contraint de chercher ceux qui nous apaisent”

« Si nous étions immortels nous ne connaîtrions que la fatigue de vivre, nous n’aurions jamais le plaisir de renaître, de revenir à la vie. Si nous étions constamment repus, nous ne ressentirions jamais le plaisir de l’appétit. Il n’y aurait pire souffrance que l’absence de souffrance. Mais puisque nous avons la chance de connaître le malheur, nous sommes contraints de chercher ceux qui nous apaisent, nous donnant ainsi le bonheur de les aimer. Sans souffrance, nous n’aurions besoin de personne. Sans manque, nous n’aurions rien à créer. Sans rêves, nous serions inertes. Notre existence ne serait qu’un vide, un non-sens pire que la douleur. »

Boris Cyrulnik

- La nuit, j’écrirai des soleils

« L’expérience du mal-être peut être intense. La descente dans l’obscurité peut être abyssale.
Combien de fois ai-je quité mon bureau pour me réfugier aux toilettes, broyée par ce trou noir qui avait élu domicile dans ma poitrine, là où aurait dû battre mon coeur ? Combien de journée ai-je passée au fond de mon lit, sortant à peine de mes couettes pour me nourrir, et fuyant la réalité grâce aux livres ? Combien de gens ont perdu goût à la vie, dans ces moments de grande dépression ?

Quand le mal-être est devenu notre quotidien, la seule priorité que nous ayons est de garder la tête hors de l’eau. Contrebalancer l’obscurité par un peu de lumière, pour remonter, le temps d’un instant, reprendre une respiration.

Pour reprendre cette fameuse respiration, nous sommes contraints, peut-être pour la première fois depuis très longtemps, de regarder les choses en face et de s’interroger dans détour : qu’est-ce qui me fait du bien ? Vraiment du bien. Assez de bien pour apporter une touche de lumière dans cette obscurité dense ?

On redécouvre alors la puissance des petites choses du quotidien. Une douche chaude. Une fleur dans un vase. Une pâtisserie encore tiède. Un auto-massage avec une huile qui sent bon. Un coucher de soleil depuis sa fenêtre. Un bon film. La lumière dorée à travers les rideaux. Un message gentil. Une balade en forêt. La redécouverte du dessin. Nos musiques préférées. Le bruit de la pluie sur les carreaux.
Ces petites choses qu’on ne voyait plus, mais qui font toute la différence aujourd’hui.

Chercher ce qui nous fait du bien est notre bouée de sauvetage. On n’a pas le droit de tricher, ou d’être approximatif. Il faut toucher le cœur, sans passer par mille chemins.

Au final, cette liste de petits bonheurs, propre à chacun, n’est-elle pas la meilleure définition que nous ayons de nous-même ?
Ainsi, le profond mal-être est peut-être le plus court chemin vers nos plaisirs les plus personnels.»

2. “Sachant mal qui je suis, je ne peux que m’inventer” : la puissance du libre arbitre.

« Plus tard, tu découvres cette autre évidence : puisque tu ne t’aimes pas, il t’appartient de te transformer, de te recréer. Une certaine exigence t’habite. Elle te soutiendra, te guidera, te fournira la petite lumière qui te permettra de te frayer un sentier dans ta nuit. »

Claire Marin

- Rupture(s)

« Le simple fait d’être au monde est un mystère inexplicable. Nous pouvons ne pas nous en étonner, vivre dans la banalité de l’immédiat, respirer sans raison, marcher au hasard, vivre et mourir comme une valise usée. Il est possible de ne jamais donner sens au prodige d’être là, mais la plupart des êtres humains s’émerveillent, et parfois s’effraient de ce fait invraisemblable : pourquoi la vie ? Pourquoi la nature ? Pourquoi l’univers ? Pourquoi pas rien ? Ces énigmes nous fascinent et nous angoissent, c’est alors que la contrainte au sens nous rassure et nous dynamise. »

Boris Cyrulnik

- La nuit, j’écrirai des soleils

« Un jour où je me sentais prise dans l’engrenage du quotidien, dans le carcan des habitudes, et que je me levais une fois de plus dans la même peau, dans le même rôle, freinée par les mêmes peurs, fatiguée par les mêmes querelles… je me suis demandée : qu’est-ce qui m’oblige à rester coincée dans cette identité ? Si les choses de ma vie me déplaisent, mon libre arbitre n’a-t-il pas une marge de manœuvre pour me construire une réalité qui me convient mieux ? »

3. “La nécessité et le plaisir d’être multiple” : l’utilité de ne pas être enfermé dans une seule identité.

« La vie la plus quotidienne est, en fait, une vie où chacun joue plusieurs rôles sociaux, selon qu’il est chez lui, à son travail, avec des amis ou des inconnus. On y voit que chaque être a une multiplicité d’identités, une multiplicité de personnalités en lui-même, un monde de fantasmes et de rêves qui accompagnent sa vie. »

Edgar Morin

- Introduction à la pensée complexe

« Kaléidoscope, patchwork, combien y a-t-il de personnes en moi ? Et pourquoi m’en inquiéter ? Est-il si tragique d’être démultipliable, d’être potentiellement toujours différent ? N’est-ce pas plus excitant que d’être enfermé dans une identité fixe, stable ? On peut d’ailleurs se demander si une telle modalité d’être est seulement possible. Pouvons-nous être autre chose que des sujets fluides, changeants ? Et n’y a-t-il pas enfin un plaisir à être toujours autre ? »

Claire Marin

- Rupture(s)

« Pourquoi ne pas vivre cinquante fois au lieu d’une seule ? On penserait alors une vie faite de bifurcations, selon une construction en arbre, et non pas une vie qui se poursuit en jetant les possibles par-dessus bord. Une vie qui, au fur et à mesure qu’elle s’affirme, a la force d’ouvrir d’autres cases, prend le risque d’adopter d’autres formes, de déployer d’autres rythmes, d’autres manières d’être, d’explorer ses possibles. Pourquoi ne pas penser que nous développons ces capacités plutôt que d’imaginer devoir y renoncer ? Ne devient-on soi-même que par la perte et la réduction des possibles ? Car c’est bien une chance et une ressource que subsistent en moi tous ces possibles lorsque mon existence se brise sur une épreuve, un échec ou une perte irréparable. On peut imaginer que ces différentes personnalités dont parle Bergson ne sont pas en compétition comme il le dit, mais qu’elles cohabitent, que l’une prendra le relais de l’autre, qu’elles se soutiennent et s’imbriquent, se nourrissent mutuellement. »

Claire Marin

- Rupture(s)

« À force de fréquenter toujours le même type de contextes, nous n’apprivoisons qu’une palette restreinte de parts de nous.
Or il y en a d’autres qui existent, et apprendre à se connaître passe, à mes yeux, par la découverte de ces facettes.

Mais pour cela, il est vain de chercher à les faire apparaître artificiellement. Il faut aller les provoquer. Leur donner un espace-temps dédié pour s’exprimer. Il faut s’extraire de ce dont on a l’habitude, aller se plonger dans d’autres contextes, et découvrir qui nous devenons en conséquence.

Et parfois, c’est la vie elle-même qui nous offre ce nouveau contexte. Par le biais de l’accident, de la rupture, du changement. Nous somme propulsé dans un autres contexte, et ainsi forcé de revêtir des parts de nous jamais réellement explorées jusqu’ici. »

4. “Celui qui crée doit être pour lui-même tout un monde, et trouver toute chose en lui-même” : Apprendre à devenir une base solide pour soi-même.

« Il fait confiance aux autres parce que, d’abord, il a confiance en lui. »

Paulo Coelho

- Manuel du guerrier de la lumière

« Il rencontre parfois des personnes l’invitant à intervenir dans des luttes qui ne sont pas les siennes, sur des champs de bataille qu’il ne connaît pas, ou qui ne l’intéressent pas. Elles veulent l’entraîner dans des défis importants pour elles, mais pas pour lui. Souvent ce sont des gens proches, qui aiment le guerrier, ont confiance en sa force, et – comme ils sont anxieux – désirent absolument son aide. Dans ces moments-là, il sourit et témoigne son amour, mais il ne cède pas à la provocation. Un véritable guerrier de la lumière choisit toujours lui-même son champ de bataille. »

Paulo Coelho

- Manuel du guerrier de la lumière